Ces villes qui se préparent aux météos extrêmes

Mardi 16 août 2022, peu après 18 heures. Après des semaines de canicule, l’équivalent de deux à trois semaines de pluie s’abat sur la ville de Paris en quelques minutes. Des milliers de Parisiens se retrouvent les pieds dans l’eau et plusieurs stations de métro de cinq lignes sont fermées. 

De l’autre côté du globe, le Pakistan connaît depuis le mois de juin des pluies torrentielles dévastatrices qui ont inondé près de 10% du territoire, tandis que la Californie et une partie de l’Ouest américain suffoquent sous un dôme de chaleur, avec un thermomètre dépassant les 45 °C pendant plus de deux semaines.

Le dérèglement climatique est désormais une réalité pour des milliers de villes dans le monde. Avec des conséquences très concrètes et immédiates sur la mobilité de millions d’habitants. Pannes à répétition, services en pointillé… la continuité de service des transports en commun est mise à mal, avec parfois d’importants dégâts matériels à déplorer. Afin de réduire les coûts engendrés par ces situations vouées à se répéter, les Autorités Organisatrices de Mobilité cherchent des solutions simples et efficaces à déployer pour rendre leurs réseaux de transports publics plus résilients face aux aléas du climat.

Des hélicoptères combattant un feu à Castaic, Californie, États-Unis.

En 2012, l’ouragan Sandy frappait la ville de New York, provoquant des inondations monstres dans les rues et le métro. En 2021, c’est au tour de l’ouragan Ida de paralyser la ville et une partie des transports souterrains. Le coût des dommages est colossal : 50 milliards de dollars au total, dont une partie pour remettre les transports en commun en état de marche. Prenant les choses en main, la MTA (Metropolitan Transportation Authority) met au point un système de «portes flexibles », élaboré en partenariat avec la société ILC Dover, basée dans le Delaware. L’objectif ? Rendre hermétique l’entrée des bouches de métro en cas de pluies diluviennes.

Faites d’un assemblage de feuilles de Kevlar enduites, ces portes ressemblent à des bâches géantes actionnées à l’aide d’une manivelle. Capables de résister à plusieurs centaines de kilos de pression, elles transforment le trou béant de la bouche de métro en joint étanche. Aujourd’hui, 68 stations du métro new-yorkais en sont équipées pour un investissement total de 2,6milliards de dollars. 2,6milliards d’investissement contre 50 milliards de dommages : le calcul est vite fait.

Portes flexibles et étanches à l’entrée du métro de New York, États-Unis.

À côté des inondations, les villes connaissent une multiplication d’épisodes de très fortes chaleurs, avec leur cortège de sécheresse, d’incendies et autres méga-feux. Touchées de plein fouet, plusieurs villes ont mis en place des parades pour atténuer ces vagues très paralysantes pour les réseaux de transport. C’est le cas de Paris et de la nouvelle ligne de tramway T9 exploitée par Keolis, qui arbore un délicat tapis végétal le long de son parcours, destiné à absorber la chaleur. Fourni par la société Ecovégétal, le revêtement est composé de quatre plantes locales, qui, contrairement au gazon classique, sont plus résistantes et moins gourmandes en eau et en engrais. Outre l’aspect esthétique, l’objectif de cet écrin vert est multiple : il contribue à atténuer les nuisances sonores, à réduire les quantités d’eau d’arrosage de 70 à 90 % par rapport à une plateforme classique, à absorber la chaleur pour améliorer le confort des passagers, et à lutter contre les îlots de chaleur en zone urbaine.

Revêtement végétal du tramway T9, Paris.

Au Royaume-Uni et en Belgique, des opérateurs ont quant à eux apposé de la peinture blanche sur des tronçons de voies de chemin de fer. Nous le savons, peindre de cette couleur un bâtiment ou un revêtement permet de réduire l’absorption et la diffusion de la chaleur. Sur les portions de rails concernées, la température de surface relevée était entre 5 °C et 10 °C plus fraîche que celle de l’air. Un atout précieux quand on connaît les dégâts que la chaleur peut provoquer en déformant les rails.

Rails peints en blanc, Liège, Belgique.

En Australie, la région de Sydney prévoit sept jours supplémentaires par an à plus de 35 °C d’ici 2030. Des températures qui impacteront les déplacements des quelque 600 000 passagers empruntant les bus de la ville chaque jour. C’est pour anticiper ce problème que le projet CAPS (Climate Adapted People Shelters) a vu le jour. Fruit d’une collaboration entre plusieurs instituts de recherche australiens, CAPS a donné naissance à des Abribus résilients. Composés d’aluminium pour absorber la chaleur, ces prototypes (dotés également de panneaux solaires qui alimentent des éclairages LED) recréent des conditions climatiques supportables pour les passagers en attente. Des températures inférieures de 15 °C par rapport à la température extérieure ont ainsi été enregistrées sur les toits des Abribus.

Qu’il s’agisse de vagues de froid, d’épisodes d’inondations ou de sécheresse, la résilience des systèmes et réseaux de transports en commun face au changement climatique devient une priorité à l’agenda de nombreuses AOM. Anticiper et intégrer cette réalité dès la phase de conception ou de renouvellement des infrastructures de mobilité fait partie de la solution. De nombreuses villes ont déjà fait le pari de cette adaptation pour atténuer les coûts – colossaux – liés aux prévisibles dégradations engendrées par les épisodes climatiques extrêmes à venir. Anticiper ou subir : nous devrons, dans tous les cas, tous agir.

Abribus résilient en phase de test, Australie, 2021.